Décision du Bureau : 13.COM 3.BUR 4.3

Le Bureau,

  1. Rappelant l’article 23 de la Convention ainsi que le chapitre I.4 des Directives opérationnelles relatifs à l’admissibilité et aux critères des demandes d’assistance internationale,
  2. Ayant examiné le document ITH/18/13.COM 3.BUR/4 ainsi que la demande d’assistance internationale n  01459 soumise par le Kenya,
  3. Prend note que le Kenya a demandé une assistance internationale pour le projet intitulé Intégration des TIC pour promouvoir les modes alimentaires africains par la sensibilisation et la transmission du PCI, pour construire des sociétés plus soucieuses de l’environnement et garantir la sécurité alimentaire : exemple des communautés Samburu, El Molo et Pokomo au Kenya:

Devant être mis en œuvre par l’African Cultural Regeneration Institute (Institut africain pour la régénération culturelle), en partenariat avec des organisations publiques et privées, le projet proposé, d’une durée de huit mois, entend contribuer à la sauvegarde des modes alimentaires traditionnels en Afrique par l’intermédiaire du patrimoine culturel immatériel. En Afrique, les aliments traditionnels contribuent non seulement à la nutrition et à la santé mais sont aussi associés à l’identité culturelle et au bien-être social. Or, face à l’urbanisation rapide et à l’évolution des styles de vie, les modes alimentaires autochtones sont aujourd’hui menacés, tout comme la transmission des connaissances et des pratiques associées, qui décline avec la disparition des personnes âgées. Compte tenu de cette situation, le projet proposé vise à sensibiliser aux modes alimentaires locaux et à en diffuser les connaissances aux membres des communautés, y compris les communautés dispersées, ainsi qu’au grand public, grâce à Internet, aux téléphones mobiles et à une série de productions audiovisuelles sur les modes alimentaires de trois communautés kényanes (les Samburu, les EI Molo et les Pokomo). Il entend démontrer le lien spécial qui existe entre les aliments traditionnels africains et l’environnement, en soulignant le rôle que peut jouer le patrimoine vivant dans le développement durable. Pouvant être répliqué à travers l’Afrique en y intégrant d’autres pays, ce projet pilote devrait susciter un regain d’intérêt des jeunes, des chercheurs et des restaurateurs pour les aliments traditionnels, un renouveau de la culture autour des aliments traditionnels et une meilleure protection de l’environnement.

  1. Prend note en outre, que cette assistance concerne l’appui à un projet mis en œuvre au niveau national, conformément à l’article 20 (c) de la Convention, et qu’elle prend la forme d’octroi d’un don, conformément à l’article 21 (g) de la Convention ;
  2. Prend également note que le Kenya a demandé une allocation d’un montant de 100 000 dollars des États-Unis du Fonds du patrimoine culturel immatériel pour la mise en œuvre de ce projet ;
  3. Décide que, d’après les informations contenues dans le dossier n  01459, la demande satisfait aux critères d’octroi de l’assistance internationale énoncés aux paragraphes 10 et 12 des Directives opérationnelles comme suit :
Critère A.1 : Le rôle des communautés dans ce projet, à savoir les communautés kényanes Samburu, El Molo et Pokomo, apparaît comme étant très limité. Les informations fournies laissent entendre que des membres des communautés ont été consultés durant la phase d’élaboration du projet, mais cela n’est pas clairement démontré. De plus, la participation des communautés à la mise en œuvre du projet, par exemple aux activités de formation, est évoquée de façon générale, sans description claire de leur participation effective ou des modalités permettant d’assurer leur implication active et directe tout au long du projet.

Critère A.2 : Bien que le budget reflète globalement les activités prévues, il n’est pas présenté de façon claire et détaillée. La description des calculs reflète uniquement les montants demandés au Fonds du patrimoine culturel immatériel et n’inclut pas toutes les sources de financement, comme la contribution de l’État partie. Le niveau de détail indiqué pour les dépenses de certaines activités, comme la visite des communautés et la réunion d’information, ne permet pas de donner une justification adéquate des dépenses prévues dans le budget proposé, ce qui rend difficile d’évaluer la justesse des montants budgétisés.

Critère A.3 : L’objectif principal étant de produire des ressources audiovisuelles qui fassent la promotion des modes alimentaires traditionnels du Kenya, les activités proposées portent sur l’élaboration d’un script, la formation à l’utilisation des réseaux sociaux, la réalisation d’un casting dans les communautés locales et, enfin, la production et la diffusion de ces ressources audiovisuelles. Elles sont essentiellement présentées comme activités promotionnelles à visée publicitaire et rien ne démontre en quoi elles contribueraient aux objectifs de sauvegarde. Des informations complémentaires sont donc nécessaires pour pouvoir mieux évaluer leur pertinence vis-à-vis des objectifs de sauvegarde ainsi que leur efficacité pour assurer des conditions favorables à la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel des trois communautés concernées. De plus, certaines activités, telles que les activités de formation destinées aux communautés, doivent être plus détaillées afin de pouvoir déterminer si elles sont bien conçues. La faisabilité du projet est également incertaine, à cause de la description insuffisante des modalités d’exécution des activités et du rôle passif des communautés dans la mise en œuvre du projet.

Critère A.4 : La durabilité du projet semble dépendre du potentiel des productions audiovisuelles à générer de la publicité. Il est donc difficile de comprendre comment les actions proposées assureraient un impact continu sur la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Il semble crucial d’apporter des informations plus précises sur la manière dont ce projet contribuerait concrètement à une stratégie durable permettant de sauvegarder les modes alimentaires traditionnels.

Critère A.5 : L’État demandeur couvrira 15 pour cent du budget total du projet pour lequel une assistance internationale est demandée au Fonds du patrimoine culturel immatériel, tandis qu’une source de financement non spécifiée en couvrira 14 pour cent.

Critère A.6 : La demande mentionne la formation de membres des communautés à la photographie et à la vidéo, à l’utilisation des réseaux sociaux et au métier d’acteur. Cela se limite cependant à des explications générales et il manque une description claire du contenu des activités de formation ainsi que de leur lien avec la documentation dans le cadre des efforts de sauvegarde. Ainsi, les informations fournies au sujet du renforcement des capacités n’indiquent pas en quoi ces activités pourraient influer directement sur les capacités des communautés concernées à sauvegarder leurs modes alimentaires traditionnels. En outre, le fait que les membres des communautés soient formés à jouer pour les productions audiovisuelles pourrait soulever des questions sur les risques de décontextualisation.

Critère A.7 : Le Kenya a bénéficié de l’assistance internationale du Fonds du patrimoine culturel immatériel pour deux projets achevés – « Les traditions et pratiques associées aux Kayas dans les forêts sacrées des Mijikenda » (dossier n  00326, 2011-2014, 126 580 dollars des États-Unis), mis en œuvre par le département de la culture du Ministère d’État pour le patrimoine national et la culture, et « La documentation et l’inventaire du patrimoine culturel immatériel de la communauté pastorale Samburu du nord du Kenya, particulièrement dans la région de la réserve de biosphère du mont Kulal » (dossier n  01024, 2015-2016, 24 038 dollars des États-Unis), géré par les Musées nationaux du Kenya – ainsi que pour deux projets en cours – « La promotion des pratiques de poterie traditionnelle dans l’est du Kenya » (dossier n  01021, 2016-2017, 23 388 dollars des États-Unis), mis en œuvre par les Musées nationaux du Kenya, et « La sauvegarde des Enkipaata, Eunoto et Olng’esherr, trois rites de passage masculins de la communauté masaï » (dossier n  00888, 2017-2020, 144 430 dollars des États-Unis), mis en œuvre par le département de la culture du Ministère d’État pour le patrimoine national et la culture. Le Kenya a également bénéficié de l’assistance préparatoire du Fonds du patrimoine culturel immatériel afin de préparer deux candidatures à la Liste de sauvegarde urgente – « Les traditions et pratiques associées aux Kayas » (dossier n  00285, 2008-2009, 6 000 dollars des États-Unis), coordonnée par le Département de la culture du ministère d’État pour le Patrimoine national et la Culture (élément inscrit sur la Liste de sauvegarde urgente en 2009), et « Rituels et pratiques associés au sanctuaire de Kit Mikayi chez les communautés luo au Kenya » (dossier n  00632, 2013-2015, 17 668 dollars des États-Unis), coordonnée par le Ministère des sports, de la culture et des arts (élément proposé pour inscription sur la Liste de sauvegarde urgente en 2019). Les travaux stipulés dans les contrats relatifs à ces projets ont été et sont toujours actuellement effectués conformément aux règlements de l’UNESCO.

Paragraphe 10(a) : Le projet a une portée nationale et prévoit une coopération avec des partenaires potentiels des secteurs public et privé, dont les Musées nationaux du Kenya et Adili Concept Ltd., une société de médias et fournisseur de solutions de communication.

Paragraphe 10(b) : L’État demandeur espère que ce projet suscitera l’intérêt de donateurs potentiels. Cependant, ces possibles contributions financières et techniques sont évoquées dans des termes généraux et nécessitent une explication plus détaillée.

  1. Décide de renvoyer à l’État demandeur la demande d’assistance internationale pour le projet intitulé Intégration des TIC pour promouvoir les modes alimentaires africains par la sensibilisation et la transmission du PCI, pour construire des sociétés plus soucieuses de l’environnement et garantir la sécurité alimentaire : exemple des communautés Samburu, El Molo et Pokomo au Kenya, et l’invite à soumettre une demande révisée au Bureau pour examen lors d’une prochaine session ;
  2. Rappelle que l’assistance du Fonds du patrimoine culturel immatériel accordée aux États parties a pour objectif de les aider dans leurs efforts de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, telle que définie dans l’article 2 de la Convention, et que les mesures de sauvegarde doivent pleinement refléter les aspirations et les souhaits des communautés en tant que participants actifs, et mettre l’accent sur le renforcement des capacités des communautés concernées, afin qu’elles poursuivent leurs efforts de sauvegarde dans l’avenir ;
  3. Encourage l’État partie, s’il souhaite resoumettre sa demande, à réviser le contenu du projet en tenant compte des préoccupations soulevées ci-dessus et à veiller à ce qu’un budget rigoureux et cohérent soit présenté, avec des détails précis et transparents.

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